Salon du Whisky de Nicolas Julhès


La cave & épicerie Nicolas Julhès tenait l'édition d’hiver de son SALON du WHISKY le samedi 7 décembre au siège, 54-58, rue du faubourg St Denis, Paris 10 ème (l’enseigne possède en effet trois boutiques dans Paris).

Bien qu’on ne prĂ©sente plus cette maison ancienne et familiale, et parce que j’ai dĂ©jĂ  Ă©voquĂ© ici ou lĂ  (et mĂŞme sur ce site-voir la rubrique « Bonnes Adresses Â»), je le ferais très brièvement en rappelant qu’elle propose deux fois par an un Salon du whisky gratuit et des dĂ©gustations du whisky thĂ©matiques ponctuelles tout au long de l’annĂ©e. Le salon est ouvert aux nĂ©ophytes comme aux amateurs de whiskies ou d’autres spiritueux, il a lieu dans une pièce dĂ©diĂ©e, en tout cas le temps du salon, qui est une annexe de l’épicerie.

Pour en savoir plus: http://www.julhesparis.fr/

 

 

Facade_cave_Nicolas_Julhes

La facade de la cave principale de Nicolas Julhès, entre deux passants !

 

J’ai aimé:

Comme d’habitude le contact direct avec soit des producteurs soit des ambassadeurs de marques plutĂ´t compĂ©tents (le plus souvent), les possibilitĂ©s de dĂ©gustation (gratuites), et les promotions parfois proposĂ©es durant le salon ou souvent proposĂ©es en boutique durant quelques semaines autour du salon. Des dialogues parfois improbables entre connaisseurs avertis presque blasĂ©s (on l’espère pas trop tout de mĂŞme) et nĂ©ophytes enthousiastes sur les stands (quelqu’un se reconnaĂ®tra sans doute dans cette catĂ©gorie-spĂ©ciale dĂ©dicace Ă  A. !). Finalement, l'idĂ©e, au dĂ©part provocatrice,i ly a quelques annĂ©es, d'ajouter aux exposants whisky un stand prĂ©sentant un autre spiritueux devient de plus en plus pertinente (en tout cas tant que l'on reste sur le vieillissement en fĂ»ts de chĂŞne), au fil des annĂ©es, et cette annĂ©e encore elle le fut, avec un joli stand d'Armagnac Ă©voquant par ses notes de pruneaux et de rancio de beaux sherry casks de... whisky.

Je n’ai pas aimé:

Peut ĂŞtre encore plus que d’habitude la trop petite taille du lieu (et le manque d’amĂ©nagements question circulation d’air…et des personnes) par rapport Ă  son audience. Le salon est victime de son succès doublement…d’abord par les habituĂ©s (dont je suis), puis par les nouveaux venus attirĂ©s par le bouche Ă  oreille ou le buzz sur internet…et Ă©videmment la gratuitĂ©. De plus, Ă  l'arrivĂ©e sur le salon, pour prendre un verre de dĂ©gustation, il fallait se rendre (ou plutĂ´t se frayer un chemin) jusqu'au fond de la pièce (dĂ©ja bondĂ©e Ă  15h), vraiment pas très logique. Il faudrait tout de mĂŞme rĂ©flĂ©chir Ă  l’avenir Ă  des changements, Ă©tudier la possibilitĂ© de dĂ©cloisonner les fenĂŞtres, de faire une vĂ©randa avec aĂ©rations qui prolongerait le salon sur la cour, peut ĂŞtre faire payer aux visiteurs juste quelques euros symboliques, que sais-je ? Bref, donner plus de place d'un cĂ´tĂ©, mais aussi rĂ©guler et faciliter les circulations de l'autre. Par voie de consĂ©quence aussi, les whiskies servis Ă©taient sans doute trop chauds pour ĂŞtre vraiment apprĂ©ciĂ©s Ă  leur juste valeur, et c'est dommage (mĂŞme si cela arrive aussi dans d'autres salons, Ă©videmment). Enfin, c'est juste mon avis.

Je n’ai pas pu visiter :

Le stand de la maison Dugas, importatrice notamment des single-malts SPRINGBANK, ainsi qu’entre autres, celui des whiskies à déguster à l’aveugle (une expérience proposée par l’organisateur), le stand JAMESON (ou il me semblait qu'on y faisait surtout des cocktails?), etc...

 

 

busy_day_salon_n._juhles_07.12.13

Un aperçu de l'affluence (peut être record?) au Salon Nicolas Julhès (là encore difficile de prendre une photo).

 

EN MARGE DU WHISKY:

En marge du Salon du Whisky, Nicolas Julhès, comme Ă  son habitude, a tenu Ă  prĂ©senter un stand "non-whisky", et lĂ  en l’occurrence consacrĂ© Ă  l’Armagnac, avec une approche 100 % artisanale reprĂ©sentĂ©e par le Domaine Aurensan, et par Caroline Rozès: Un petit coup de chapeau d’abord pour leur revendication artisanale, symbolisĂ©e par le slogan indiquĂ©  sur la bouteille (un peu, cĂ´tĂ© whisky,  Ă  la manière de Compass Box ou Bruichladdich), l’application des « trois 0 Â» (0 rĂ©duction, 0 sucre, 0 colorant). Cela n’est pas courant, ni dans l’Armagnac, ni dans le Cognac. Une dĂ©marche d’authenticitĂ© Ă  saluer, proche de celle de Grosperrin/La Gabare (Cognacs de collection).

En dĂ©gustation chez eux :

D’abord un 20 ans d’âge (lot N°8 Ă  43,6 %) : Un Armagnac au nez aussi beau qu’un Sherry cask (lire...single-malt whisky), une bouche très gourmande sur les fruits mĂ»rs, pruneau en tĂŞte et joli rancio (estimĂ© Ă  18/20), puis un 30 ans (lot N° 17 Ă  41 %, mis en bouteille en 2012) avec un nez très fin, une bouche proche de la prĂ©cĂ©dente avec une petite note de noix en plus, un rancio plus prononcĂ© et avec plus de profondeur cĂ´tĂ© boisĂ© et fruitĂ© (estimĂ© Ă  18,5/20). Ensuite un millĂ©sime « 1975 Â» (lot N°50 Ă  41,9 %) un peu plus marquĂ© par des notes de solvant (terme non pĂ©joratif et gĂ©nĂ©rique sur certains types de notes) mais aussi par de belles notes de fruits exotiques, d’orange, d’abricot et divers fruits confits, superbe (estimĂ© Ă  18,5/20). Enfin, deux millĂ©simes d’un autre domaine (Leberon) de la mĂŞme marque, un millĂ©sime « 1989 Â» (lot N°9 Ă  45,6 %), complexe, fruitĂ©, boisĂ© (joli rancio lĂ  encore), mais assez sec et ferme en bouche. D’une belle Ă©lĂ©gance, je l’ai estimĂ© Ă  18,5/20. Dernier de la dĂ©gustation, le millĂ©sime « 1986 Â» (lot N° 8 Ă  45,4 %) lui est davantage marquĂ© par des notes de solvant, plus sec encore et plus classique paradoxalement. Estimation Ă  17,75/20. Une maison Ă  suivre, assurĂ©ment.

 

 

Armagnacs_Domaine_Aurensan_chez_Julhes

Quatre des cinq Armagnacs qui étaient proposés à la dégustation.

 

 

LES PRINCIPAUX STANDS DE WHISKY:

 

-ARDBEG/GLENMORANGIE: Pas de nouveautĂ©, mais la confirmation (heureuse) que le « Corryvreckan Â» d’ARDBEG n’est pas abandonnĂ© comme des rumeurs le laissaient entendre. Par contre, je ne sais si c’était dĂ» Ă  la chaleur, mais le GLENMORANGIE « Signet Â», habituellement grandiose, s’est avĂ©rĂ© lĂ  Ă©pouvantablement boisĂ© (bois neuf), quasi-imbuvable, Ă©trange.

-The BALVENIE: La distillerie artisanale proposait, entre autres, les nouveaux plutĂ´t doux et classiques « Triple-Cask Â» 12 et 16 ans (j’ai prĂ©fĂ©rĂ© le second, avec son joli fruitĂ© acidulĂ©), destinĂ©s au marchĂ© duty-free, le sĂ©ducteur mais unidimensionnel 12 ans d’âge « First Fill Â» (Single-Barrel) Ă  47,8 %. Je ne sais plus s’ils proposaient le nouveau 17 ans « Double-Wood Â», de qualitĂ©, en tout cas je le recommande. Mais c’est bien le souvenir du splendide « Tun 1401 » (batch 8) dĂ©gustĂ© au live qui survole tout Ă  mon sens chez eux en ce moment.

-GLENFIDDICH: Rien de nouveau, mais deux belles bouteilles en dĂ©gustation, le très Ă©quilibrĂ© et financièrement accessible « Malt Master’s Edition Â» que je recommande chaudement et le prestigieux 30 ans d’âge (pas testĂ© le dernier batch).

-The GLENLIVET: La distillerie proposait de dĂ©guster les 3 versions expĂ©rimentales –toutes sans mention d’âge, non filtrĂ©es Ă  froid et Ă  48,7 %- prĂ©ludant Ă  la nouvelle version sans compte d’âge Ă  venir en 2014 (voir reportage ci-après-en bref personnellement j’ai votĂ© pour la version « Revival Â»), et le classique 18 ans. Je n'ai rien dĂ©gustĂ© lĂ  car je connaissais toutes les versions prĂ©sentĂ©es.

-HUDSON: La micro-distillerie de l’Etat de New York poursuit son bonhomme de chemin avec notamment son « Manhattan Rye Â» très efficace en cocktail (proposĂ© sur le stand) ou son « Baby Bourbon Â» gourmand. Le gros bĂ©mol toujours, mĂŞme si la qualitĂ© est lĂ , c'est le rapport entre son prix Ă©levĂ© (plus de 60 €) et la bouteille de capacitĂ© de 35 cl seulement.

-ISLE OF JURA: Pour rĂ©sumer, un 10 ans « Legacy Â» lĂ©ger, mais très Ă©lĂ©gant et parfumĂ©, un 12 ans « Elixir Â» trop caramĂ©lisĂ©, un « Prophecy Â» tourbĂ© et enfin bien Ă©quilibrĂ©, un 21 ans non testĂ© cette fois, et un 30 ans d’âge que j’estime (2 ème dĂ©gustation) toujours trop vineux Ă  mon goĂ»t, mince de corps, avec un dĂ©sagrĂ©able nez fermier, pas mauvais et pas trop Ă  mon goĂ»t, mais je pense de loin en dessous du 40 ans d’il y a quelques annĂ©es.

 

Facade_Bout_54_Nicolas_Julhes_vitrine_Jura

La partie whisky de la vitrine de la boutique avec une séléction de whiskies dont des Isle of Jura.

 

 

-JAMESON: LĂ  la tendance sur le stand Ă©tait plus pour les cocktails….Ă  partir de l’entrĂ©e de gamme dont c’est Ă  mon sens le meilleur usage. Par ailleurs, pour ceux qui ne connaissent pas encore, foncez sur le 18 ans d’âge (chef d’œuvre) et pour un moindre budget les très doux et fins « Gold Reserve Â» ou « Select Reserve Â».

-LAPHROAIG: Hormis le classique 10 ans d’âge (bien tourbĂ©, mais un peu rude), le stand proposait, entre autres, le « Triple-Wood Â» (affinage sherry) qui ne me convainc toujours pas, et le « Quarter Cask Â» qui se porte très bien en 2013 (c’est celui que je recommande dans les prix raisonnables), modĂ©rĂ©ment tourbĂ© et Ă©quilibrĂ©.

-NIKKA: J’y reviendrais par ailleurs (Ă©tant donnĂ© leurs très belles nouveautĂ©s haut de gamme de l’annĂ©e) mais le groupe japonais se porte mieux que jamais, ici avec des rĂ©fĂ©rences raisonnables en prix et en âge, tant en blended-whiskies qu’en « Pure-Malt Â» (blended-malts) ou en single-malts jeunes (les MIYAGIKYO et YOICHI « Non-Age Â» ou 10 ans d’âge sont de bonnes introductions Ă  la gamme et aux whiskies japonais en gĂ©nĂ©ral).

-SUNTORY: L’autre grand groupe producteur de whiskies japonais prĂ©sentait lui aussi (hormis le classique blend « Hibiki Â») des versions sans mention d’âge (signe des temps), dont la version « Puncheon Â» (toutes un peu chères Ă  mon goĂ»t). CĂ´tĂ© single-malts, au-delĂ  du stand/salon, recommandons pour dĂ©couvrir la marque sans grands frais les assez diffĂ©rents HAKUSHU 12 ans (lĂ©gèrement fumĂ© et herbacĂ©) et YAMAZAKI 12 ans (très fruitĂ© –fruits au sirop-et floral).

 

intérieur_cave_Nicolas_Julhes_1

Une vue de la cave à spiritueux non loin de la pièce ou se tenait le salon.

 

*Stand Maison DUGAS:

Un stand qui proposait notamment un single-malt de la distillerie SPRINGBANK. Rien pu dĂ©guster cette fois-ci. Mais je connais assez bien les productions de cette distillerie que j’apprĂ©cie. Pour ceux qui ne connaissent pas, je conseille la version « C.V. Â» qui est une bonne introduction Ă  la gamme rĂ©gulière, quasiment non tourbĂ©e et assez minĂ©rale (ou en LONGROW, sa version tourbĂ©e, excellente).

*Stand MAISON DU WHISKY:

Difficilement accessible Ă  l’heure ou je souhaitais m’y rendre tellement il y avait de l’affluence (mais ce n’est pas de leur fait), je n’ai pas pu voir ni dĂ©guster toute l’offre, comportant notamment deux KILCHOMAN (dĂ©jĂ  dĂ©gustĂ©s au Whisky Live), une mise en bouteille de nĂ©goce de Gordon & MacPhail (un LEDAIG je crois-non testĂ©) et deux Signatory Vintage, dont un BUNNAHABHAIN jeune (2002-2013, de 11 ans d’âge, fĂ»t N°421 Ă  56,8 %) dans la « Cask Strength Collection Â» (issu d’un Sherry Butt) que j'ai pu heureusement dĂ©guster et qui s’est avĂ©rĂ© très abordable sans ajout d’eau, fruitĂ©, honnĂŞte, d’une belle rondeur et assez fin.

 

*Stand de dégustation à l’aveugle (Nicolas Julhès):

Une expérience sur quatre flacons que je n’ai pas eu le temps de tester….bluffante selon plusieurs visiteurs. "Next time, maybe?".

 

*Stand du négociant Stewart LAING:

Suite Ă  la scission avec son frère Fred, Stewart LAING a rĂ©cupĂ©rĂ© de son cĂ´tĂ© la gamme « The Old Malt Cask Â» (des single-casks rĂ©duits Ă  50 % le plus souvent), dans laquelle Ă©taient prĂ©sentĂ©s un fin mais un peu Ă©teint LAPHROAIG 8 ans mais aussi un splendide CAOL ILA 18 ans (d’une majestueuse finesse et complexitĂ© supĂ©rieure Ă  la version officielle). L’autre gamme prĂ©sentĂ©e, « Douglas of Drumlarig Â» proposait des versions rĂ©duites Ă  46 % de single-malts de diffĂ©rentes rĂ©gions, mais ici presque toutes du Speyside. Citons ici un joli GLENCADAM 8 ans (2004) marquĂ© par les esters, un MORTLACH 14 ans (1998) atypique assez fin, un BENRINNES 12 ans (2002) sur des notes de sherry dĂ©licates, enfin un BALMENACH 10 ans très bien Ă©quilibrĂ© et assez fumĂ©. A suivre...

 

*Stand du site internet commercial « PURE SPIRIT »:

Autre nouveau stand chez Julhès, celui de RĂ©gis, amateur averti du whisky que les forumeurs connaissent bien, qui proposait une sĂ©lection de single-casks issus de fĂ»ts proposĂ©s Ă  celui-ci par divers nĂ©gociants. Une sĂ©lection ici (je veux dire pour ce Salon) entièrement basĂ©e sur des single-malts issus de fĂ»ts ayant contenu du Bourbon, pour des distilleries plutĂ´t connues (en tout cas pour 2/3 d’entre elles) pour utiliser le plus souvent des fĂ»ts de Sherry (comme par exemple BEN NEVIS). Trois sĂ©lections de qualitĂ©, je dois dire, avec notamment un très sĂ©duisant, peu Ă©picĂ©, modĂ©rĂ©ment citronnĂ©, non acide et crĂ©meux BLADNOCH 22 ans (1991 Ă  47,8 %) comme on en voit rarement (mon prĂ©fĂ©rĂ© du stand), puis un BEN NEVIS 17 ans (1996 Ă  51 ,6 %) veloutĂ©, sur les fruits au sirop et des herbes de montagne, Ă©tonnant, pour finir enfin sur un bien complexe GLEN KEITH 20 ans (1993 Ă  51,8 %) sur les fruits mĂ»rs de tout ordre, de thĂ©, de laurier, d’herbes et de paraffine, entre autres notes. Un single-malt Ă  l’ancienne comme on les aime. A suivre Ă©galement...

 

 

Le_stand_Pure_Spirit_au_Salon_Julhes_2013

Le stand Pure Spirit, un nouveau venu sur la scène du whisky, ou la qualité était au rendez-vous.

 

CONCLUSION:

Le lieu et surtout l’évĂ©nement gardent tout leur intĂ©rĂŞt, c'est sĂ»r (et j'y vais et j'en parle assez souvent pour ne pas ĂŞtre jugĂ© de visiteur ingrat), mais cela devient difficile d’apprĂ©cier les whiskies dans un tel contexte, surtout cette fois-ci je trouve, aussi peut ĂŞtre faudrait il repenser Ă  des alternatives qui ne soient pas trop restrictives tout de mĂŞme pour l’esprit que Nicolas Julhès a toujours souhaitĂ© ĂŞtre celui de ces rencontres, c’est-Ă -dire accessible et dĂ©mocratique, pas facile. CĂ´tĂ© whiskies, quelques belles surprises cĂ´tĂ© nĂ©goce, mais un manque d’audace (dans le bon sens du terme, attention !) manifeste de la part de plusieurs distilleries officielles, certaines se reposant un peu trop sur leurs lauriers (certes parfois superbes), d’autres surfant sur la vague devenue presque obligatoire des versions sans compte d’âge….Un regret, enfin, pas de distillerie française. Qui aime bien châtie bien ! 

 

Grégoire Sarafian, le 14/12/2013

 

Photos (dont je m’excuse par avance de la faible qualité, étant donné les conditions difficiles...) par votre serviteur.

 

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