The GLENLIVET: VOTE pour l' Edition limitée 2014


Le 18 novembre 2013, je fus convié à une soirée privée afin de déguster trois créations (single-malts) de la distillerie The GLENLIVET, puis voter, en compagnie d'une vingtaine de personnes, pour ma version préférée afin qu'elle devienne peut être la nouvelle "édition limitée 2014". Cela se passait au bar "Sherry Butt", à Paris, dans le quartier du Marais:

 

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Le "Sherry Butt", un bar à plusieurs ambiances, et d'étonnants tableaux ce soir là, ici une représentation d'une des créations

soumises à notre vote (Photo : © Sébastien Foulard)

 

Le contexte :

 

Lorsque Sébastien Foulard de l’agence Genepi m’a prévenu de cette soirée et m’a demandé si j’étais intéressé, je n’ai pas hésité une seconde. La distillerie écossaise The Glenlivet occupe une place toute particulière dans mon cÅ“ur, étant la première distillerie dont j’ai dégusté un (single-malt) whisky, quelque part dans le temps vers l’année 1999. C’est aussi « accessoirement Â» la première distillerie écossaise ayant obtenu la licence de distillation, en 1823, et un merveilleux malt apéritif. Le Glenlivet 12 ans fut aussi mon « welcome dram Â» lors de mon premier voyage aux USA et le 18 ans d’âge demeure un de mes digestifs favoris, aussi mon attente était importante quant à cet événement. Merci donc à Sébastien et à Pernod-Ricard pour cette invitation…

 

L’événement:

Pernod-Ricard, le groupe propriétaire de la distillerie écossaise The Glenlivet a récemment lancé une opération mondiale en vue de choisir une nouvelle édition limitée de son single-malt qui devrait sortir au printemps 2014, ce en organisant des consultations de membres de la presse classique, de blogueurs et de membres du club de fidélité « The Guardians of Glenlivet Â» via des soirées de dégustation et de vote. A l’issue de ces consultations, au cours desquelles les participants sont conviés à déguster trois créations expérimentales du futur Glenlivet, ceux-ci sont ensuite amenés à voter pour leur création préférée, soit en ligne soit sur place, « Ã  l’américaine Â» à l'aide d'un ordinateur équipé d'un logiciel à cet effet.

 

 

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Une vue "aérienne" de la première table servant à déguster le "Classic", la première des trois créations d'Alan Winchester (Photo: © Sébastien Foulard).

 

L’organisateur:

Pernod-Ricard, en présence, entre autres personnes, de l’ambassadeur Ken Lindsay (de la division Chivas Brothers du groupe) pour la marque The GLENLIVET. Les trois versions proposées ce soir ont été élaborés par le célèbre maître-distillateur (entre autres fonctions!) Alan Winchester.

 

Le hôte/le lieu:

Le SHERRY BUTT (bar à cocktails et à whisky) situé au 20, Rue Beautreillis (75004 Paris) dans le quartier du Marais. Mi-branché, mi-cosy, le lieu ouvert uniquement en soirée a été fondé par Amaury et Cathleen, officiant anciennement au Prescription Cocktail Club et au Curio Parlor (plus connu sous le nom de Nikka Bar-qui existe toujours d’ailleurs). Cette sympathique équipe propose des cocktails avec une touche artisanale et une carte de plus d‘une cinquantaine de whiskies de différents pays.

 

 

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A chaque pièce, sa version de The GLENLIVET, son ambiance, ici plutôt cosy (Photo: © Sébastien Foulard, faite avant l'arrivée des convives).

 

Les versions proposées à la dégustation :

Après une mise en bouche (ou plutôt une préparation du palais en dégustant une version qui servira de mètre-étalon) via la dégustation de la version d’entrée de gamme The GLENLIVET 12 ans, 40 %, il nous a été proposé de déguster trois versions différentes, toutes conditionnées dans de petites bouteilles de 20 cl, chacune dans un espace différent du bar, histoire de changer d’ambiance, et (chose plus contestable), chacune dans un verre différent. La première dite « Classic Â», dans un verre tulipe de dégustation (un magnifique verre conçu pour la marque), la seconde dite « Revival Â», servie dans un verre tumbler de la marque (joli mais peut être pas adapté), et enfin la troisième dite « Exotic Â» dans un verre proche d’un tumbler mais un peu plus rond. Nous n’avons donc pas pu comparer sur un plan égal les trois expressions. Les whiskies étaient accompagnés d’appréciables mises en bouche ou tapas variées, le tout dans une atmosphère tamisée et à demi-cosy, à demi-branchée.

 

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Les trois créations proposées à la dégustation ce soir là, avec à gauche, ma préférée, la "REVIVAL" (Photo:© Sébastien Foulard).

 

 

1.« CLASSIC", non filtré à froid, 48,7 % :

Couleur : Or à Vieil or (les indications de couleurs sont sous réserve, car la lumière était presque tamisée).

Nez : Fin et doux. Notes de miel, de sucre glace, de fruits confits variés, et en guise de fin rouge, du caramel façon carambar.

Bouche : D’entrée de jeu ce qui frappe, c’est la jeunesse de cette version. C’est court, vif, marqué par les raisins secs, une belle note de crème brûlée, avec en arrière-plan le caramel (naturel) et un peu de miel. Courte, la bouche révèle cependant une certaine sensualité, une finesse inattendue. Quelques années de plus lui auraient fait du bien.

Tenue à la dilution : Plus onctueux, révélant une note de figue, mais ne pas trop diluer, car il y a là peu de corps.

Conclusion : Un peu trop courte en bouche, un peu trop fine, manquant de corps, de profondeur, cette version non dénuée de charme n’est cependant pas à la hauteur de l’attente suscitée. Elle a d’ailleurs recueilli peu de suffrages de la part des confrères présents. Suggère une maturation en majeure de fûts de Bourbon très (trop) jeunes avec une petite part de fûts de Sherry (plusieurs remplissages) plus âgés.

Estimation de note chiffrée : 85,5/100

 

2.« REVIVAL", non filtré à froid, 48,7 % :

Couleur : Vieil or (les indications de couleurs sont sous réserve, car la lumière était en partie tamisée).

Nez : Puissant et presque alcooleux. Le potentiomètre est dans le rouge, pas de doute on est bien chez Glenlivet, avec en guise d’amplis Marshall les fûts de Bourbon de premier remplissage, révélant des tonnes de notes de bonbons anglais, de pêche au sirop, d’ananas, mais aussi…de pommes rouges cuites. Ah, là on suppose qu’il y a également une part de fûts de Sherry dans l’assemblage. Malgré l’agressivité manifeste du nez, il y a une certaine séduction qui s’exerce vers moi !

Bouche : Bien plus puissante que la première version, et même clairement un peu alcooleuse sans ajout d’eau, elle est aussi bien plus expressive, et à mon avis plus âgée. Reprenant les notes marquées par les esters du nez, elle est assez épicée, elle a plus de charpente, de densité et de profondeur, en un mot, plus de cohérence que la première version. Du miel, des fruits, des fleurs, avec de la vanille en arrière-plan, mais une vanille qui lorgne vers la glace rhum-raisins. La petite touche de Sherry est un plus, rendant le profil plus complexe là aussi. Il y a plus de séduction aussi, mais dégustée pure, elle est tout de même un peu déséquilibrée. Au négatif, donc, elle rappelle en cela la gamme régulière des affinages de GLENMORANGIE de l’ Â« Ã¨re Diageo Â». Au positif, elle me fait penser un peu à la version 16 ans du The GLENLIVET "NADURRA" (Bourbon).

Tenue à la dilution : Avec un peu d’eau, on obtient le bon équilibre. C’est gourmand, bien fruité, dense, un peu boisé, épicé, plus cohérent. Là tout le caractère de cette version s’exprime sans excès. Elle m’évoque, là  encore, un « NADURRA Â», mais en version affinée en fûts de Sherry, en un peu plus civilisée et moins unidimensionnelle.

Conclusion : Trop excessive pour certains (bien qu’ayant recueilli plus de suffrages que la première version), trop classique pour d’autres, cette version n’est pas non plus « l’ultime Glenlivet Â» que l’on pourrait rechercher, mais elle s’en rapproche un peu à mon sens, c’est pourquoi j’ai voté pour elle, en précisant qu’elle était meilleure légèrement diluée. Une version définitive à 46 % constituerais à mon sens un bon compromis.

Estimation de note chiffrée : 90,5/100

 

3.« EXOTIC", non filtré à froid, 48,7 % :

Couleur : Vieil or (les indications de couleurs sont sous réserve, car l'éclairage était tamisé).

Nez : Séduisant, marqué par les esters, des épices, des fruits confits variés et quelques fruits exotiques, dont notamment…de la banane flambée au rhum.

Bouche : Surprise, la bouche est bien moins dans la séduction que le nez, elle est comme fermée, et elle le demeurera en partie tout du long, à peine améliorée par l’ajout d’eau. La complexité est là, c’est sûr, et un caractère épicé et boisé clairement (et « technologiquement Â») mis en avant. Cela me gêne quelque peu, même si cela apporte des choses par rapport aux deux versions précédentes. Notes de bois brûlé (le brûlage des fûts pour cette version a dû être important, cela se sent-disons-le, l'on peut déjà parler de "whisky technologique"), d’épices (poivre noir, gingembre, muscade), de chocolat noir, de vanille en arrière-plan (mais très discrète), et enfin d’ananas rôti au miel. Demeure assez ferme et sèche.

Tenue à la dilution : Difficile de trancher si l’ajout d’eau est un plus ici, car d’un côté le caractère manifestement épicé et boisé de cette version est un peu accentué, mais de l’autre, il assouplit un peu le profil et réveille un peu les autres saveurs (j’ai cru sentir une note de réglisse, puis de chocolat noir à l’orange).

Conclusion : Je suis partagé sur cette version, plus que pour la précédente, car je la trouve trop « artificiellement exotique Â». Le Glenlivet 12 ans de la gamme régulière l’est bien plus, en réalité (et disons-le, cela a été d’ailleurs sans doute le meilleur des 4 whiskies dégustés lors de cette soirée !). Non, l’ Â« Exotic Â» n’est pas mauvais, il a des qualités, mais il demeure « entre deux eaux Â», et je reproche à ses concepteurs d’avoir surtout recherché du point de vue du concept marketing et des techniques utilisées à avoir cherché à attirer vers le whisky une clientèle plus intéressée par le rhum. Tout l’indique, à commencer par le nom de cette version. Une version qui a recueilli, ce soir là, pas mal de suffrages…

Estimation de note chiffrée : 86,5/100

 

 

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La fameuse "machine à voter", sollicitée à la fin des dégustations (Photo: © Sébastien Foulard).

 

 

En guise de CONCLUSION, quelques réflexions:

En définitive, au-delà de son intérêt gustatif et participatif, cette dégustation a été significative de l’époque dans laquelle nous vivons : Je m’explique. Emboîtant le pas à ARDBEG, à GLENMORANGIE ou encore à The MACALLAN ou HIGHLAND PARK (avec sa gamme des « Warrior Series Â»), Pernod-Ricard, à travers The GLENLIVET essaie de miser à son tour sur la suppression du compte d‘âge pour un single-malt (car ne nous faisons pas d’illusion, cette prochaine édition limitée est sans doute un ballon d’essai pour une version régulière sans compte d’âge). Le pari est risqué mais le marketing est derrière, en soutien, avec des concepts comme ceux que nous avons vu pour ces trois versions. Maintenant du point de vue strict de la dégustation, je n’ai pas été le seul à trouver que toutes les trois peinaient à égaler la gamme régulière, à commencer par l’étendard de la distillerie (et du whisky écossais que dans une certaine mesure) que demeure, pour moi, le 12 ans d’âge. C’est bon signe dans un sens (rassurant sur la qualité de la gamme régulière), mauvais dans un autre (pas rassurant sur les perspectives et sur l’investissement consenti pour créer une belle édition limitée).

Là encore malheureusement il nous faut redescendre sur terre…nous ne savons pas quel va être le prix de vente de cette version, et à quelle échelle (combien de bouteilles ?) va-t-elle être diffusée ? Ces deux facteurs, malheureusement, sont déterminants. Hormis quelques exceptions (à commencer par la gamme régulière de la distillerie), il ne faut pas s’attendre, pour moins de 80 €, à une version exceptionnelle, même si répétons-le encore une fois, cette dégustation pour moi n’a pas été négative, que je n’ai pas dégusté de « mauvais  whiskies Â». Non, c’est juste un signe de plus de l’avènement du marketing « mondialisé Â» et du whisky « cocktailable Â» ou « mixo-compatible Â» (je sais, ce sont d’horribles néologismes), ici comme ailleurs, et ça on peut tout de même le regretter un peu.

Une petite frustration, dans la soirée (mais je me doute que cela s’y prêtait pas vraiment, cela restait très cadré), ne pas avoir pu tester un assemblage d’au moins deux sur les trois whiskies, pour voir, car il me semblait qu’il y avait peut être des compromis aromatiques à trouver, des pistes à suivre…En tout cas une belle soirée dans un lieu intéressant, à explorer par ailleurs, et le plaisir de rencontrer de nouveau un ambassadeur de la distillerie, et de déguster des GLENLIVET en avant-première.

 

Grégoire Sarafian, 27/11/2013 (révisé le 02/12/13 & le 03/04/15)

 

 

PS : C'est finalement la version "EXOTIC" qui a été choisie par le plus grand nombre et donc finalisée, commercialisée par la suite.

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